Respect de l’article 1 du CMP quelque soit le montant du marché.
L’arrêt du Conseil d'Etat du 30 janvier 2009, requête n° 290236, section du contentieux, ANPE qui rappelle que tous les contrats entrant dans le champ d'application du Code des marchés publics (CMP) sont soumis aux dispositions de l'article 1er du code et doivent de ce fait respecter les grands principes qui découlent de l'exigence d'égal accès à la commande publique, quels que soient leurs spécificités. Cet arrêt, bien que relatif au code des marchés publics issu de sa rédaction du décret du 7 mars 2001, est à méditer avec le relèvement du seuil de 4 000 € HT à 20 000 € HT.
Tous les contrats entrant dans le champ d'application du Code des marchés publics (CMP) sont soumis aux dispositions de l'article 1er, et doivent de ce fait respecter les grands principes qui découlent de l'exigence d'égal accès à la commande publique, quels que soient leurs spécificités.
La Haute assemblée rappelle le fait que les marchés, quel que soit leur montant, passés en application du code des marchés publics, sont soumis aux principes qui découlent de l'exigence d'égal accès à la commande publique à savoir "liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures".
Conseil d'Etat du 30 janvier 2009, requête n° 290236
Transparence et devis.
L’arrêt CAA Douai n°11DA00590 du 31 décembre 2012 a posé un principe intéressant qui devrait interpeller nombre de gestionnaires d’EPLE pour qui les MAPA se résument le plus souvent à la demande de devis.
En l’espéce, la commune de HOYMILLE a adressé des demandes de devis à quatre fournisseurs en 2006, en indiquant les caractéristiques de la tondeuse dont elle souhaitait faire l'acquisition sans leur faire connaître les critères, notamment de prix et de performance technique, sur lesquels elle se serait fondée pour retenir l'une des offres en concurrence.
La cour administrative d’appel de Douai a rappelé que les marchés passés selon la procédure adaptée prévue par l'article 28 du code des marchés publics sont soumis aux dispositions de l’article 1er de ce même code et que, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire, dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché.
Ainsi, lorsqu’un acheteur fait une demande de devis, il est soumis au principe de transparence : il doit faire connaître les critères de jugement des offres aux candidats. Cette jurisprudence est particulièrement intéressant dans la mesure où la pratique des devis est une procédure habituelle dans les EPLE.
En matière de respect de la réglementation des marchés publics, le fonctionnaire engage sa responsabilité au pénal même s'il n'est pas décideur.
C’est ce que vient de rappeler la Cour de Cassation dans un arrêt du 29 juin 2005 en condamnant le gestionnaire de la cuisine centrale de la ville de Colombes pour octroi d’avantage injustifié à un an d’emprisonnement avec sursis et 15 000 euros d’amende. En effet la cour a déclaré “René X coupable d’atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans des marchés publics et, en répression, l’a condamné à un an d’emprisonnement avec sursis et 15 000 euros d’amende “. Un verdict sévère pour ce gestionnaire de la cuisine centrale de la ville de Colombes, qui concevait les menus, commandait les produits, contrôlait les livraisons et les factures qu’il transmettait au service des paiements (tiens on dirait un gestionnaire d’EPLE). Il était seul à connaître les prix et les volumes commandés au fil des mois et il a choisi de ne pas soumettre certains approvisionnements en denrées alimentaires, à la procédure régulière alors que le seuil de 300 000 francs à l’époque était ou allait être dépassé.
En clair, ce gestionnaire de collectivité a choisi clairement et sciemment de ne pas appliquer les règles des marchés publics. Ors, lors de la passation des marchés publics, l’acheteur et les entreprises doivent éviter de recourir à certaines pratiques sous peine de sanctions pénales tel le délit d’octroi d’avantages injustifiés. S’il ne faut pas exagérer le risque pénal que la prudence et la maîtrise de la législation permettent en général d’éviter, il arrive que dans certains cas l’infraction est si caractérisée qu’elle témoigne clairement d’une intention malhonnête. Le délit de favoritisme est considéré comme constitué dès qu’il y a intentionnellement octroi d’un avantage injustifié en violation des lois et règlements ou simple tentative.
Par ailleurs comme le précise la Cour de Cassation « il n’importe que ceux qui avaient le devoir légal et formel de contrôler l’exécution de la mission de René X…n’aient pas parfaitement exercé ce contrôle, ne serait-ce qu’en fin d’exercice budgétaire, dès lors que disposant d’un pouvoir de fait, René X… a lui-même dépassé la limite d’exercice budgétaire, (…) et la limite connue de ses obligations » (ça ne vous rappelle pas la distinction gestionnaire-ordonnateur ?).
Il est intéressant de noter également que René X n’avait pas reçu de contrepartie de la part des entreprises concernées : il n’y a pas de corruption, ni d’avantage obtenu... Simplement, le gestionnaire s’étant rendu compte qu’il était en dépassement du seuil a sollicité le recours à une facturation d’une société « amie » ou filiale pour tenter de masquer l’erreur ; ce qui a permis à la cour d’écarter son argument de l’ignorance du dépassement.
La haute juridiction a donc estimé que le fonctionnaire avait procuré à certaines sociétés l’avantage d’être rémunérées pour des prestations servies à la cuisine centrale de la commune, tout en violant le cadre réglementaire imposant le recours à l’appel d’offres. Ses agissements étaient donc contraires à la liberté d’accès des candidats aux marchés publics de la ville de Colombes, et la connaissance de la violation de la loi comme la méconnaissance systématique et en temps réel des dépassements de seuil, caractérisaient « l’intention coupable ». Et la cour de rappeller que “l’accomplissement, en connaissance de cause, d’un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics, caractérise l’intention coupable de l’article 432-14 du Code pénal”.
Je ne vais pas disserter sur cette décision qui vient simplement rappeller que tout fonctionnaire doit respecter la loi dans l’exercice de ses fonctions. Il me semble simplement que l’on peut - calmement et sans dramatiser - se poser la question de la transposition de cet arrêt dans le cas d’un gestionnaire d’EPLE igorant sciemment la règlementation en matière de marchés publics, y compris en MAPA.
Pour vous faire une opinion, vous pouvez visualiser le jugement en fichier PDF.
Cour de cassation - décision du 29 juin 2005.
Un autre exemple d’application du délit de favoritisme avec la violation intentionnelle des principes de liberté d'accès aux marchés publics et d'égalité de traitement des candidats, sanctionné le 21 septembre 2005 par la chambre criminelle de la Cour de cassation à de la prison avec sursis et une amende.
Délit de favoritisme et MAPA.
La Cour de cassation a confirmé dans un arrêt du 14 février 2007 les condamnations prononcées par une cour d'appel à la suite de l'attribution d'un marché de 5 850 euros : la méconnaissance des principes inscrits à l'article 1er du code des marchés publics, qui s'applique à tous les marchés publics quel que soit leur montant, entre dans les prévisions de l'article 432-14 du code pénal, qui sanctionne les atteintes à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics.
Indemnisation en cas d’éviction irrégulière d’une entreprise dans un marché public.
L'éviction irrégulière d'un candidat à un marché public peut-elle donner lieu à indemnisation ; et cette indemnité peut atteindre un montant conséquent. En témoigne la décision du Conseil d'Etat du 27 janvier 2006, confirmant la condamnation de la commune d'Amiens prononcée par la CAA de Douai à verser, au titre préjudice commercial et financier subi, une indemnité de 290 360 euros, assortie des intérêts légaux, à une entreprise irrégulièrement écartée au cours d'une procédure.
A noter que lorsqu'il apparaît que l'entreprise illégalement écartée avait une chance sérieuse d'emporter le marché, elle a droit à l'indemnisation de l'intégralité du manque à gagner qu'elle a subi.
Nécessité de contractualiser le résultat d’un appel à la concurrence.
L’INSERM a lancé en septembre 2001, une consultation pour la réalisation d’un outil de publication sur internet concernant les sites de dix unités de l’Institut Fédératif de Recherche de l’hôpital Henri-Mondor de Créteil. Le directeur de l’unité 99 de l’inserm informe par courriel que l’offre de la société Ecritel est retenue. Cependant, aucun de bon de commande ne parvient à la société et le projet est finalement confié à un prestataire.
Le juge administratif va rejeter la demande d’indemnisation présentée par la société Ecritel au motif que « le courriel du 8 novembre 2001 par lequel le directeur de l’unité 99, qui n’avait d’ailleurs pas qualité pour engager l’Institut, disait accepter l’offre de la société Ecritel, n’a pas été régularisé par un courrier signé par une personne ayant qualité pour engager l’établissement public ; que dans ces conditions, la société Ecritel ne peut se prévaloir d’un contrat valablement conclu avec l’inserm le 8 novembre 2001 ».
Tribunal administratif de Melun, 15 décembre 2005, n° 03-917, Société Ecritel
Le comptable face à une facture d’un montant supérieur à 15 000 € HT doit avoir de joint au mandat un contrat, un bon de commande (valant contrat) ou un certificat administratif.
« L’arrêt du Conseil d’État en date du 8 février 2012 (req. n° 340698 - 13 février 2012-CCAS de Polaincourt), Ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État précise que le comptable public à qui n’est pas produit un contrat écrit pour un marché public d’un montant supérieur au seuil fixé par l’article 11 du Code des marchés publics (15 000€ HT actuellement) doit signaler à l’ordonnateur l’insuffisance des pièces. Dans ce cas, il ne peut payer la dépense correspondante, sans engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire, que sur la production d’un certificat administratif de l’ordonnateur attestant l’absence de conclusion d’un contrat écrit. Ainsi, pour les marchés publics à procédure adaptée d’un montant égal ou supérieur au seuil fixé par l’article 11 du Code des marchés publics, doit être produit au comptable public, conformément à l’analyse du juge, le contrat écrit au sens large, c’est-à-dire le document écrit de passation. À défaut, un certificat administratif par lequel l’ordonnateur prend la responsabilité de l’absence de marché écrit, permet au comptable, qui n’est pas juge de la légalité de la passation du marché, de procéder au règlement du mandat de dépense. »
En résumé le comptable face à une facture d’un montant supérieur à 15 000 € HT doit avoir de joint au mandat un contrat, un bon de commande (valant contrat) ou un certificat administratif. Une décision n° 11LY00517 de la CAA de Lyon du 24/05/12 semble confirmer qu’un bon de commande dans la mesure où il identifie les parties contractantes, les prestations et leur prix semble être valable comme pièce pour un MAPA devant faire l’objet d’un contrat écrit.
La communication des motifs de rejet d’une offre est une obligation de publicité et de transparence.
Le Conseil d’Etat a rappelé que la communication des motifs de rejet d’une offre dans le cadre d’un marché public était une obligation de publicité et de transparence.
La commune de Boulogne-sur-Mer avait lancé un appel d’offres ouvert en vue de la passation d’un marché portant sur des travaux à réaliser sur un édifice. La société Hairis a présenté une offre pour l’attribution d’un des sept lots. Après le rejet de son offre, l’entreprise a demandé la communication des motifs de cette décision. La société a ensuite saisi le tribunal administratif de Lille d’une demande d’annulation de la décision de la commission d’appel d’offres rejetant sa candidature et demandé aussi à ce que la mairie différe la signature du marché. Le juge administratif ayant rejeté ses demandes, l’affaire a été portée devant le Conseil d’Etat.
Décision du Conseil d’Etat du 09/08/2006, Société Hairis SAS (maintenant Sarl Gallis) c/commune de Boulogne-sur-Mer.
MAPA et information des candidats non retenus - recours.
Sur ce sujet, un jugement intéressant du TA de Lyon. On peut aussi lire l’arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 23 décembre 2009.
L'utilisation des références dans les critères de choix dans les procédures d'appel d'offre.
Le critère de l'expérience professionnelle ne peut être utilisé à titre de critère additionnel à ceux fixés par le code des marchés publics pour sélectionner les offres.
La communauté de communes du pays de Lure a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour l'aménagement de la rue du Culot dans la commune de Magny d'Anigon. Le règlement de la consultation précisait que la valeur technique de l'offre serait appréciée par la remise d'un mémoire qui devait indiquer notamment les références pour la réalisation d'ouvrages similaires lors des trois dernières années.Soutenant qu'en prévoyant la prise en compte, pour l'appréciation de la valeur technique des offres, de l'expérience des candidats et non pas exclusivement de la valeur intrinsèque des offres, le règlement de consultation, au vu duquel la commission d'appel d'offres a désigné l'offre la plus économiquement la plus avantageuse, est entaché d'illégalité, la société S. demande l'annulation de la décision de la communauté rejetant sa candidature. Le tribunal administratif de Besançon fait droit à sa demande dans un jugement du 13 novembre 2008. La cour administrative d'appel de Nancy rejette la demande de la communauté de commune de voir annuler le jugement. Dans un arrêt du 5 août 2010, elle retient que si le critère de l'expérience professionnelle, qui est relatif aux capacités des candidats, peut être utilisé pour sélectionner les candidatures, il ne peut être utilisé, à titre de critère additionnel à ceux fixés par le code des marchés publics, pour sélectionner les offres.
Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre formation à 3, 5 août 2010
Jurisprudence marchés publics 3